La Ville

La Ville

Dissolution des conseils municipaux et régionaux : un recul d’au moins 20 ans de la dynamique de la participation citoyenne à la gestion des affaires locales

DSC_0112.JPG

Dans une réflexion sur le sort qui pourrait être réservé aux communes et aux régions dans la période transitoire amorcée par le Burkina  Faso, Antoine Raogo Sawadogo qui n’est plus à présenter lorsqu’on parle de décentralisation, évoque trois (03) cas de figures. Il s’agit du maintien des conseils municipaux et régionaux en fonction jusqu’au terme de leur mandat, l’organisation d’élections locales anticipées et une troisième option, choisie par les autorités de la transition, qui est la dissolution des conseils municipaux et régionaux et leur remplacement par des organes de gestion provisoires d’exception. De l’avis du Président de l’organisme « Le Laboratoire citoyennetés » œuvrant à l’émergence de l’Etat local, face à l’enjeu politique de légitimité qui pourrait militer en faveur d’une dissolution des conseils de collectivités, il faut qu’il soit mis en avant l’enjeu de développement social et économique local, afin de sauvegarder les acquis de la décentralisation en maintenant en fonction les conseils municipaux et régionaux.

 

La dissolution des conseils municipaux et régionaux et leur remplacement par des délégations spéciales peut bien se comprendre du fait que l’insurrection populaire peut apparaître comme un signe de désaveu du système de gouvernance politique qui prévalait, source de conflits électoraux entravant la gouvernance locale dans certaines collectivités, ainsi que des dérives de gestion de certains des responsables de collectivités. La situation actuelle peut aussi se justifier par le fait que les évènements des journées insurrectionnelles ont révélé un hiatus entre certains responsables de collectivités et les citoyens, rendant peu probable leur capacité à assurer une gestion sereine et cohérente de la cité.

 

Pour Antoine Raogo Sawadogo qui apporte les justificatifs précédents sur la dissolution des instances de délibérations communales et régionales, le problème majeur de cette option est que cela équivaudrait à un recul d’au moins vingt (20) ans de la dynamique de la participation citoyenne à la gestion des affaires locales. Plus concrètement, l’on assisterait ainsi à la mise à l’écart des populations à la gestion des affaires locales et à la recentralisation de la gestion des affaires locales. Une autre conséquence est que les missions d’animation et de développement actuellement mises en exergue se flétriront et leur réveil serait hypothéqué, entraînant des conséquences incalculables. Pour couronner le tout, il y aurait le risque de perdre les précieuses contributions des partenaires de coopération, en l’absence d’organes de gestion élus pour conduire les affaires des communes et des régions. Tous ces manques à gagner risqueraient de réalimenter des sources de mécontentement des populations en même temps que cela hypothèquerait nos performances dans l’atteinte des Objectifs du millénaire.

 

Donc, quel que soit le format de la transition, le maintien des collectivités territoriales est un impératif si on souhaite que plusieurs années d’investissement humain et financier au niveau local ne soient remises en cause selon le Président du Laboratoire citoyennetés.

 

Pour lui, le bilan des deux décennies de décentralisation démontre qu’il est indispensable de compter avec les collectivités territoriales, si l’Etat central aspire à un développement social et économique équitable. C’est pourquoi, la structure qu’il dirige depuis 2003 opte, d’une part, pour le maintien des conseils de collectivités territoriales durant cette phase de transition. Cela s’explique par le fait qu’une rupture prononcée dans la gestion des affaires locales et le retour à une gestion centralisée ou déconcentrée par la tutelle comportent des conséquences économiques et sociales néfastes. Maintenir les conseils municipaux et régionaux dans leur rôle de gestion des affaires locales durant cette phase de transition peut être un moyen d’entretenir la sérénité au sein des populations à la base, là où il n’y a pas de problèmes majeurs de gestion.

 

Pour ce faire, les autorités de transition se doivent de prendre des directives appropriées afin que le fonctionnement des collectivités territoriales en cette période soit dépouillé de toute action politique majeure sous l’impulsion et l’implication de partis politiques ; de veiller à la bonne circulation de l’information ; de prendre des dispositions appropriées pour les cas à problèmes, notamment là où il y a des situations de blocage et d’inviter tous les acteurs à la rigueur dans la conduite et la gestion des affaires locales.

 

D’autre part, le président du Laboratoire Citoyennetés suggère des élections locales anticipées couplées aux élections législatives après l’élection présidentielle pour redonner une nouvelle légitimité à la fois à l’Assemblée nationale et aux conseils de collectivités. Le souci serait que notre processus démocratique gagne en maturité en se saisissant de cette crise pour renégocier un nouveau contrat social entre gouvernants et gouvernés. Ce renouveau démocratique passerait non seulement par la construction de nouvelles règles de gestion du pouvoir d’Etat, mais aussi par la mise en place d’institutions nationales et locales légitimes et surtout à l’écoute des populations.

 

Amadou Oury SANOU



19/11/2014
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Actualités locales pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 21 autres membres